Rencontre interdisciplinaire « Le jardin méditerranéen dans le paysage, histoire et imaginaire »

Rencontre interdisciplinaire

coordonnée par Jean-Dominique Poli et Françoise Graziani

L’histoire et l’imaginaire des jardins entretiennent une relation complexe entre nature et culture, tout particulièrement dans le paysage méditerranéen. La notion de “poétique des lieux” s’articule ici à une nouvelle prise de conscience, la nécessité de préserver la diversité du patrimoine végétal de la Corse, pour interroger le statut patrimonial du jardin et repenser ses fonctions symboliques, sensorielles, pratiques et expérimentales.

10h-12h30. Campus Mariani, salle DECA 001

Poétique des lieux

Président de séance : Jean-Christophe Bailly (Ecole Nationale Supérieure du Paysage de Blois)

              10h. Gilles Pollizi (Université de Haute-Alsace / ENSP Versailles)

Cythère, île errante : un jardin au cœur de la Méditerranée 

              10h30. Sandrine Gualandi (Université de Corse)

  Le jardin comme lieu sourcier : quand l’arrière-pays fait entendre le murmure de la parole poétique.

              11h. Isabelle Moulin (IZNAO Lyon)

Imaginaire des jardins corses : lecture buissonnière d’une thématique et réinterprétation d’une oeuvre singulière, celle de Laurence Lorenzi

              11h30. Sophie Garrone (Paris Sorbonne / Ecole d’Architecture de Versailles)

Les inventaires des jardins en Corse : état des lieux

              12h. Discussion

14h-18h. Palazzu Naziunale

14h. Atelier botanique de Corsica Grana co-animé par Caroline Favier-Vittori, porteur de projet Corsica Grana (Conservatoire Botanique National de Corse) et Stéphane Rogliano, pépiniériste.

              16h. Le renouveau d’un patrimoine oublié

  Table-ronde animée par Vannina Bernard Leoni (directrice du Pôle innovation et développement de l’Université) avec Sophie Cueille (conservateur régional de l’inventaire du patrimoine culturel à la CTC), Caroline Favier-Vittori (porteur de projet Corsica Grana), Laetitia Hugot (directrice du Conservatoire Botanique National de Corse), Lucette Poncin (historienne-géographe) et Angélique Quilichini (Docteur HDR en biologie végétale, expert botaniste au Comité Jardins remarquables).

Les conférences et table-rondes sont ouvertes à tous.

L’atelier Corsica Grana est ouvert à tous sur inscription à cette adresse : favier@oec.fr

Présentation des intervenants

Jean-Christophe Bailly est cette année l’invité d’honneur de l’Ecole Doctorale de l’Université de Corse, où il donnera le 16 juin à l’Amphi Ettori une conférence intitulée « Le paysage comme expérience ». Il a enseigné l’histoire du paysage à l’Ecole Nationale supérieure de la Nature et du Paysage de Blois de 1997 à 2015, et est l’auteur de nombreux essais qui rencontrent les axes prioritaires communs aux trois laboratoires de recherche de l’Université de Corse, tant dans le domaine des sciences de la nature que des sciences de l’homme : rapports entre nature et culture, littérature et arts, territoire et identité, préservation et réappropriation des patrimoines matériels et immatériels.

Gilles Polizzi, professeur de littérature française du XVIe s. à l’Université de Haute Alsace-Mulhouse, intervient depuis 1994 dans le Master « jardins historique et paysage » de l’Ecole d’Architecture de Versailles. Spécialiste des relations entre littérature et art des jardins à la Renaissance, il a édité la version française du Songe de Poliphile (Imprimerie nationale, 20084) et travaille à une histoire littéraire des jardins de la Renaissance à l’âge classique.

– Sandrine Gualandi, docteur en littérature comparée de l’Université de Corse, est professeur certifiée de l’enseignement secondaire.

Isabelle Moulin, muséographe et directrice artistique de l’atelier de recherche et de conception de projets scénographiques IZNAO (Lyon), est spécialiste du paysage. Elle a participé avec Stéphane Crozat et le Centre de Ressources Botaniques Appliquées (CRBA) de Lyon à une étude préparatoire pour un projet de valorisation des travaux de Laurence Lorenzi sur les jardins corses.

Sophie Garrone, titulaire d’une maîtrise en archéologie de l’Université de Montpellier et d’un DESS en histoire des jardins de l’Université Paris-Sorbonne, a été professeur d’histoire en Nouvelle Calédonie avant de s’installer en Corse. S’est intéressée aux paysages romains auprès de Christine Hamdoune (CERCAM Montpellier III), diplômée du Master « jardins historiques, Patrimoine et Paysage » dirigé par Monique Mosser (ENSAV). A enseigné l’histoire géographie pendant une dizaine d’année dans un collège de tribu kanak en Nouvelle-Calédonie.

Sophie Cueille, historienne de l’art, est conservateur régional de l’inventaire du patrimoine culturel à la Collectivité Territoriale de Corse.

Caroline Favier et Laetitia Hugot sont responsables de la marque Corsica Grana (http://www.corsicagrana.com), créée par le Conservatoire Botanique National de Corse, service de l’Office de l’Environnement, pour certifier les plantes et semences produites en Corse à partir de matériel végétal issu de populations insulaires « sauvages » et pour assurer leur traçabilité. Elle s’inscrit dans une volonté de valorisation, de réappropriation et d’utilisation de la flore insulaire et oeuvre avec les producteurs locaux à la préservation du patrimoine végétal corse, dont la remarquable diversité (près de 3000 espèces végétales, dont près de 300 endémiques corso-sardes et 130 strictement corses) est menacée par l’importation massive de 95% des plantes vendues sur le marché.

– Lucette Poncin (historienne-géographe auteur de plusieurs ouvrages sur l’histoire des paysages de Corse et de Haute-Provence) et Angélique Quilichini (docteur en biologie végétale de l’Université de Corse, enseignant chercheur, expert botaniste au Comité Jardins remarquables et chargée de mission à la CTC) viennent de publier ensemble un ouvrage sur les jardins botaniques d’Ajaccio, qui retrace l’histoire et l’évolution des jardins de la ville du XVIe siècle à nos jours.

 

Résumés

Gilles Polizzi, Cythère, île errante:  un jardin au cœur de la Méditerranée

Avant les temps modernes, ce qu’on peut définir comme le modèle structurel des jardins méditerrannéens n’entretient, pour des raisons économiques, climatiques et fonctionnelles, que fort peu de rapport avec la mer. Qu’il s’agisse du modèle « oriental » ou alexandrin de l’Antiquité, des jardins romains, des jardins « médiévaux » ou islamiques perpétués jusqu’aux temps modernes au Maroc ou en Andalousie (Grenade), ou encore des jardins italiens de la Renaissance transposés en France à partir du XVIe siècle, aucun n’est axé sur le littoral (les villégiatures côtières des XIXe et XXe siècles étant une exception qui marque un tournant dans  l’histoire du paysage). Pourtant si l’on considère l’importance, dans la définition du jardin « français », du « mythe de Cythère », théâtralement fixé par le tableau de Watteau (1717) et popularisé par le Voyage en Orient de Nerval (1840-50) on constate que, depuis ses origines médiévales jusqu’à son épanouissement au XVIIe s., l’imaginaire du jardin français réfère à une navigation vers Cythère, allégorisée en « île d’Amour » puis en « séjour de Vénus ». C’est ainsi que le jardin, lieu poétique et topos de l’allégorie courtoise,  s’assimile presque invariablement  à une « une île en mer ensus de gens » (Froissart). On s’attachera à montrer comment l’idée d’une « île-jardin » au cœur de la méditerranée donne une forme et un sens à l’imaginaire paysager européen du XVe au XVIIe siècles.

Sandrine Gualandi, Quand l’arrière-pays fait entendre le murmure de la parole poétique. Le jardin comme lieu sourcier.

« On ne trouve pas l’espace, il faut toujours le construire » : c’est ainsi que Gaston Bachelard nous enseigne une façon d’être-au-monde afin de percevoir, à travers le prisme de nos énergies intérieures, un espace géographique initialement perçu comme un « territoire de l’imaginaire, » où l’enracinement de l’Etre commence au moment même où celui-ci prend conscience qu’il est hanté par un sentiment de Nostalgie. Sentiment de la perte ou de ce qui n’a pas encore été légué et qui suscite la question ontologique qui pousse l’Etre vers la reconnaissance de ce qu’il porte en lui, de ce que sa substance lui permet de percevoir sans cependant lui être totalement révélé. A partir d’un poème d’Yves Bonnefoy nous tenterons d’aborder un espace géographique délimité mais non moins ouvert sur la recherche de l’Originel : le jardin, pour présenter l’univers imaginaire de Laurence Lorenzi, construit à partir de sa relation avec un espace référentiel défini, la Corse.

Sophie Garrone « Les inventaire de jardins en Corse : Etats des lieux »

Au travers des différents pré inventaires de jardins de Corse, on s’attachera à mettre en lumière un patrimoine souvent méconnu et oublié, à dégager une chronologie du développement de l’art des jardins en Corse. On s’interrogera sur les influences et les particularismes qu’il a connu.